PODCAST | Bénédicte Prot avec Albert Serra, réalisateur du film Pacifiction -Tourment sur les îles.
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Après une première mondiale dans le cadre de la compétition cannoise, Pacifiction – Tourment sur les îles a été présenté, à La Roche-sur-Yon, par la productrice Montse Triola d’Andergraun Films, la société co-fondée avec Albert Serra, parmi les Films du jury (elle fait partie des trois arbitres de la compétition Nouvelles Vagues). La séance a été suivie d’un séance de Q&A passionnante où le cinéaste catalan a parlé du contraste entre le côté artificiel du dispositif mis en place dans ce lieu exotique et la performance presque hyperréaliste des acteurs, de la volonté d’éviter les clichés déterminante dans son approche, de la capacité de la caméra (ou des caméras, ici au nombre de trois) à saisir ce que l’oeil ne peut voir… Il a détaillé longuement sa méthode avec les acteurs, qui joue d’une perte de contrôle du comédien sur sa propre image et de la vulnérabilité qui résulte de l’illisibilité pour l’interprète du travail en train de se faire – accentuée, en l’espèce, par le recours intermittent à une oreillette pour “guider” (ou l’inverse) Benoît Magimel, et favoriser une dissociation entre parole et corps. Serra a aussi évoqué le titanesque travail de montage qui s’est effectué “par distillation” à partir de 540h de rushes et 1200 pages de transcription de dialogues pour aboutir à 70 scènes (sachant que 90 scènes ont été entièrement montées qui n’ont finalement pas utilisées). Nous avons poursuivi la conversation ensuite autour du “système abrasif” par destruction successive qu’Albert Serra pratique, du surréalisme permanent de tout, de la dimension ludique de son approche, du travail sur l’intimité, de l’importance du grand écran pour faire ressentir de manière physique l’ambivalence et la simultanéité des impressions, du désir d’ouvrir le spectre, d’aller vers le complexe, de toucher le coeur…
Pacifiction – Tourment sur les îles : Sur l’île de Tahiti, en Polynésie française, le Haut-Commissaire de la République De Roller (Benoît Magimel), représentant de l’État Français, est un homme de calcul aux manières parfaites. Dans les réceptions officielles comme les établissements interlopes, il prend constamment le pouls d’une population locale d’où la colère peut émerger à tout moment. D’autant plus qu’une rumeur se fait insistante: on aurait aperçu un sous-marin dont la présence fantomatique annoncerait une reprise des essais nucléaires français.